A Couthures-sur-Garonne, journalisme de solutions et écologie se rencontrent
Cet été, le Festival international de journalisme, sous le parrainage du Groupe Le Monde, a fait la part belle à la crise écologique. Sparknews y était pour causer journalisme de solutions.
Ce fut une édition centrée sur les questions qui fâchent, qu’il s’agisse des liens entre investigation et justice, de l’entre-soi parisien de la profession ou du traitement du mouvement social des gilets jaunes. Elle s’est même conclue par une mise en accusation de la presse en bonne et due forme, un “faux procès” à partir des critiques émises par les spectateurs pendant les conférences, dont certaines retranscrites par l’Agence Initiale.
La quatrième édition du Festival international de journalisme, sous le parrainage du groupe Le Monde, s’est déroulée du 12 au 14 juillet 2019 sur les bords de la Garonne. Pour Gilles van Kote, directeur délégué chez Le Monde et président du festival, ces trois jours ont été l’occasion de “se poser ensemble les bonnes questions, y compris (et surtout?) celles qui viennent ébranler les certitudes”. Pour cela le festival s’est articulé autour d’un pays à l’honneur, la Tunisie, ainsi que de six thématiques : le genre, l’éducation, les rapports entre journalistes et lois, la frontière journalisme/fiction, le rejet des médias et l’écologie. Parmi les 5 700 festivalier•e•s, cette dernière thématique a connu un franc succès. Sparknews proposait en ce sens des ateliers et participait à une conférence au croisement du journalisme de solutions et de la crise climatique.
Lors de ces ateliers, les personnes intéressées se sont révélées nombreuses : de la chargée développement durable auprès des collectivités, au citoyen convaincu mais qui se sent peu soutenu en passant par l’étudiante en école de journalisme. L’ensemble des participant•e•s a d’abord été étonné du qualificatif de journalisme “de solutions”. Pour nombre d’entre eux, leur route a déjà croisé celles de telles articles, notamment dans la presse régionale, sans qu’ils et elles ne l’identifient comme une pratique journalistique particulière. Toutes et tous se considèrent informé•e•s sur les questions écologiques et en cela rejoignent d’autres festivalier•e•s interrogées par Synecdoc, India et Martin, avec l’impression que les médias “n’en font pas assez” et ne parlent qu’à des personnes concernées. Un sentiment qui revient est celui de faire partie des “convaincu•e•s” et que ce type de journalisme a du mal à atteindre ceux qui sont fatigués de l’infobésité ou méfiants à l’égard des médias.
Mais comment “en faire plus” justement ? La proposition du journalisme de solutions est de donner des clés sur comment répondre aux enjeux écologiques. C’est par exemple la rédaction du Monde qui lors de la dernière COP (COP24) a lancé une série nommée Comment agir pour le climat. Complétée par un fil live sur le site web pour répondre aux questions des internautes sur ces sujets, elle était composée d’articles et de reportages orientés solutions, comme celui sur Västra Hamnen, le quartier suédois qui fonctionne à 100 % aux énergies renouvelables.
Une approche qui se heurte à plusieurs limites : la plus évidente étant les ressources qu’elle demande. Un reportage coûtera toujours plus cher que de reprendre un rapport du GIEC depuis son bureau. De plus, comment dépasser les moments forts de l’actualité écologique pour privilégier un traitement plus « pédagogique » ?
En fin de festival, ces échanges ont été complétés par les retours de journalistes lors l’avant-dernière table-ronde intitulée Peut-on informer sans désespérer ?. Car le constat est là : dur de trouver par quel bout aborder l’effondrement du vivant, un monde à + 5° C ou les catastrophes qui ne sont plus si naturelles. L’aspect anxiogène de ces informations à de quoi faire plonger le grand public dans la panique, l’incrédulité, ou encore la fatigue. Audrey Jacquet, responsable du réseau de médias partenaires de Sparknews, Anne-Sophie Novel, réalisatrice du documentaire Les Médias, le monde et moi, David Groison, rédacteur en chef de Phosphore, et Mathieu Duméry, qui commet les vidéos de Professeur Feuillage, sont pourtant unanimes : informer sur la crise écologique est une nécessité.
Le rôle du journaliste devient alors central. Dans les rédactions, les contraintes liées à la course de l’actu et, souvent, au manque de ressources, ne permettent pas toujours un traitement sur le temps long. Et les informations concernant la crise écologique sont, par ailleurs, souvent cryptiques, complexes, techniques. La peur d’être vu comme trop engagé, subjectif, militant existe également. Vous pouvez retrouver à ce propos la captation vidéo de l’échange Journalisme et engagement : quelles frontières pour un•e journaliste ? avec Jon Henley du Guardian, Marie-Monique Robin, réalisatrice entre autres de Qu’est-ce qu’on attend ? sur un village en transition, Simon Roger, responsable du service Planète du Monde, ou encore Olivier Razemon, journaliste au Monde spécialisé sur les questions de transport.
Nous repartons donc du festival avec la certitude que si la crise écologique n’a rien d’un sujet simple, nombreux sont les journalistes prêt•e•s à l’aborder avec un angle innovant.
Comme illustration, écoutez Quel pouvoir a-t-on sur les décisions environnementales ? dans Le Grand Midi ou Jamais. Cette émission participative de Radio Parleur a été diffusée sur les ondes du 102.2 FM, une radio éphémère sur le web et dans la région créée le temps du festival. Ou encore Réunir autour du jardinage : le pari réussi du jardin des Agrions, un reportage de Coline Le Piouff et Agathe Hernier qui a été récompensé du concours Jeunes Reporters pour l’Environnement.