Repenser la solidarité en temps de Covid-19
Chez Sparknews, nous croyons que les temps de crises, comme ils balaient nos certitudes, sont également de belles opportunités pour nous adapter et repenser nos rapports au monde. Pour une équipe qui tente de faire émerger de nouveaux récits pour accélérer la transition écologique et sociale, nous nous devons d’interroger quels récits germent de cette catastrophe planétaire qu’est le CoVid-19. Dans la #SparkMinute de cette semaine, nous nous intéressons à la solidarité à travers de belles initiatives locales, des exemples d’entreprises qui s’engagent et repensent leurs modèles et des prises de positions qui nourrissent nos imaginaires.
Liberté, Égalité, Fraternité, Solidarité ?
Quand les organisations s’engagent
En temps normal, les membres du comité de l’umudugudu, ou « village » en kinyarwanda, la langue nationale du Rwanda, veillent à la sécurité, à la propreté et au climat social de leur quartier. Ces 15 000 umudugudu, rassemblant chacun entre 100 et 200 familles, ont joué un rôle fondamental dans la distribution alimentaire et les autres formes de solidarité. Dans le quartier de Kacyiru, à Kigali, l’élu Félix Ufiteyezu a ainsi dressé la liste des personnes vulnérables de son “village”, notamment celles qui ont perdu leur emploi, puis récolté les dons des habitant·e·s les plus riches du quartier pour pouvoir organiser des distributions de nourriture. En savoir plus dans Le Monde.
En France, ce ne sont pas des entités administratives mais les Régies de quartier ont également été des lieux forts de solidarité grâce à leur ancrage territorial. Implantées sur l’ensemble du territoire national, les 131 Régies de Quartier et Régies de Territoire couvrent ainsi 320 quartiers prioritaires où vivent plus de 3 millions d’habitant·e·s. Ces associations emploient de nombreuses personnes en réinsertion dans des secteurs divers comme l’entretien des espaces verts, la propreté ou encore des recycleries. Découvrez dans La Nouvelle République et Ouest-France comment elles se sont adaptées à la crise sanitaire notamment en développant de nouvelles offres.
Afin de faire face à l’épidémie de coronavirus, des rédactions du journal breton Ouest-France ont lancé des groupes d’entraide locaux. Sur les groupes de Rennes, Saint-Malo, Redon, Vitré et Fougères, plus de 1790 personnes ont échangé, se sont organisés et ont partagé des initiatives solidaires. Les particuliers se sont également rassemblés sur les réseaux sociaux, et notamment dans les « groupes » Facebook selon Le Monde.
Dans les logements intergénérationnels d’Un Toit 2 Générations ou Habitat et Humanisme, des jeunes vivent chez des personnes âgées pour rompre l’isolement de ces dernières. Dans ce joli reportage de Reporterre, découvrez comment la peur du virus a mit fin à certains contacts entre ces colocataires pas comme les autres tout en offrant d’autres occasions de tisser des liens, que ce soit autour de pots de confiture ou de jardinage.
Initiatives locales contre désordre global
Et pour organiser l’entraide de proximité, on peut utiliser le kit « Coronavirus : et si on s’organisait entre voisins ». Gratuit, ce kit est disponible sur le site Voisins Solidaires comprend des tracts à glisser dans les boîtes aux lettres, un panneau sur lequel inscrire les offres de services et les besoins ainsi qu’un annuaire des voisins, sur lequel noter e-mail et téléphone. En s’appuyant sur un réseau de 1 400 mairies, le kit a été téléchargé plus de 500 000 fois soit c’est 10 fois plus que celui consacré à la « Canicule » en 2018 selon cet entretien d’Atanase Périfan au Monde.
La solidarité passe aussi par l’empathie et la rencontre. Allomondo est une initiative de SINGA qui propose de développer l’amitié entre les peuples avec des coups de fil. Sur la plateforme en ligne AlloMondo, il suffit de remplir un court formulairepour être mis en relation anonymement avec des nouvelles et nouveaux arrivant·e·s pour qui se faire des ami·e·s en France est le premier pas vers l’inclusion. Pour lancer la conversation, Allomondo soumet un questionnaire spécialement pensé pour briser la glace et réfléchir ensemble sur différentes visions du monde, de l’avenir, de l’autre.
Vous souhaitez vous engager au service des personnes réfugiées et déplacées ? Techfugees France recherche des bénévoles ! Cette organisation lancée en 2015 développe des solutions technologiques aux besoins particuliers des réfugié·e·s. Depuis l’année dernière, le programme-pilote Tech4Women accompagne par exemple douze femmes réfugiées dans leur insertion sur le marché numérique français. Rendez-vous mercredi 17 juin 2020 à 18h pour une conférence (en ligne) de présentation de l’équipe actuelle et de leurs projets en cours.
Avec la pandémie de Covid-19, le racisme, les inégalités et la vulnérabilité que connaissent les personnes noires dans le monde entier ont été exacerbés. Les dernières mobilisations contre ces injustices ont montré la nécessité pour chacun·e de mieux comprendre cet héritage de racisme pour aller de l’avant. Avec cet objectif, l’UNESCO et le Programme des Nations Unies En mémoire de l’esclavage organisaient une conférence de 20 minutes sur « Confronter ensemble l’héritage de l’esclavage : le racisme », disponible en ligne.
Les Cuistots Migrateurs c’est un traiteur qui nous fait voyager grâce aux talents de chef·fe·s réfugié·e·s depuis quelques années. Distanciation sociale oblige, cette entreprise sociale d’une vingtaine de personnes a dû se réinventer au cours des derniers mois. Leur Pop Up parisien a récemment rouvert et se transforme en boutique traiteur avec vente à emporter, livraisons et une offre Lunch Box pour les entreprises en manque de cantine. Vous pouvez aussi écouter l’histoire de ces Cuistots et de leur adaptation au contexte dans le podcast Fait Maison.
Et si on imaginait plus loin ?
D’où viennent celles et ceux qui se consacrent à la solidarité ? Pour un rapide tour d’horizon, nous vous conseillons le podcast Clichés, co-produit par la Croix-Rouge française et Louie Media. Ces épisodes de 20 minutes donnent la parole tous les mercredis aux personnes qui, un jour, ont décidé de s’engager pour elles et pour les autres. Il y a Sabrina Albayrak qui après avoir grandi dans le sillon d’une mère aide-soignante décide de créer des dispositifs pour que les personnes âgées restent libres de leurs décisions jusqu’à leurs dernières heures. Colette Biot, ancienne photographe professionnelle, va à la rencontre des personnes en précarité en milieu rural avec Croix-Rouge sur Roues. Enfin, on découvre le parcours de Maha Habib, elle même arrivée de Syrie il y a quelques années à peine, qui guide les nouvelles et nouveaux arrivant·e·s dans leurs premiers pas en France. À écouter ici.
Le moteur de la solidarité pourrait bien être l’utopie. Dans le cadre de leur nouveau projet Utopie(s), le collectif Data Gueule nous livre cet entretien avec la politologue Réjane Sénac, autrice de « L’égalité sans condition« . Plus récemment, elle a effectué 120 entretiens dans tous les horizons de l’activisme en France et en tire la conclusion que pour ces personnes engagées à penser un autre monde (idéalement meilleur), l’utopie apparaît désormais comme « le seul réalisme possible ». Elle revient sur l’objectif d’émancipation commun entre des luttes aussi diverses que l’antispécisme, le féminisme, la lutte contre la pauvreté ou les Zones À Défendre (ZAD). À regarder ici.
Chaque semaine, la minute Spark c’est une invitation à découvrir les initiatives face à la pandémie qui nous inspirent mais aussi nous permettent de réfléchir à l’après. Nous sommes persuadé•e•s que cette crise renferme de précieux enseignements sur notre système économique mondialisé. Qu’il s’agisse d’éducation, de solidarité, de rapport au travail ou au vivant, à nous de refuser de revenir au statu quo une fois la crise sanitaire passée. Découvrez les éditions consacrées à l’éducation, l’énergie, le travail, l’alimentation, la biodiversité, la démocratie, les biorégions et le genre.