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Au Danemark, l’île de Samsø carbure aux renouvelables

 

Alors que l’indépendance énergétique est au cœur des préoccupations européennes, les habitants de l’île de Samsø vivent en autosuffisance depuis 2007 grâce aux énergies renouvelables. Retour sur l’aventure de la première île à énergie renouvelable au monde.

Par Amélie Drouet, pour En Quête de Demain

Atteindre l’autosuffisance énergétique grâce aux renouvelables. C’est l’objectif, utopique pour certains, que vise la municipalité de Samsø en 1997, lorsqu’elle remporte un appel à projets du gouvernement danois. « Après les accords de Kyoto, le ministre de l’Environnement a lancé un concours pour les îles du pays », se souvient Søren Hermansen, un local devenu porte-parole de cette transition. « Il fallait présenter un plan pour passer à 100 % d’énergies renouvelables en moins de dix ans. »

Une décennie plus tard, l’île produit plus d’énergie de sources renouvelables qu’elle n’en consomme. Onze éoliennes terrestres assurent l’approvisionnement électrique des 3 700 insulaires. Dix autres, érigées en mer, compensent les émissions liées aux transports grâce à la revente de 60% de l’électricité produite. Trois chaudières biomasse alimentent les trois quarts des foyers en chauffage et en eau chaude. Le reste est équipé en panneaux solaires thermiques, chaudières biomasse individuelles et pompes à chaleur. 

Persuasion pragmatique et esprit entrepreneurial

La véritable pierre angulaire de cette transition a été l’engagement des habitants. « Le cahier des charges stipulait que la transition devait se faire dans le cadre de la législation existante, avec les technologies disponibles et sans aide financière dédiée », explique Søren.

Søren a donc dû se lancer à la conquête de la participation citoyenne. Dans le contexte d’exode rural et de perte d’emplois des années 1990, les insulaires sont alors avant tout sensibles aux arguments économiques. « C’était une bonne affaire », résume Jørgen Tranberg, un fermier qui a investi deux millions d’euros dans l’aventure. « Je ne l’ai pas fait pour le climat. Je n’aurais jamais dépensé autant d’argent si le calcul n’était pas intéressant. Sinon ce n’est pas durable. » Un calcul qui est rendu possible par la législation de l’époque, qui garantit un prix de rachat de l’énergie sur dix ans. 

La participation financière des habitants représente en fin de compte les trois quarts d’un investissement total de 60 millions d’euros, complété par la municipalité. « Le Danemark a une forte tradition d’organisation coopérative », ajoute Søren. « Il était donc logique de proposer aux habitants de prendre des parts dans l’infrastructure énergétique. »

Outre des investissements intéressants, la transition énergétique de Samsø s’avère créatrice d’emplois et de nouvelles opportunités. Les fermiers transforment leurs déchets en ressource en vendant leur paille comme combustible pour les chaudières biomasse. Les artisans ont pu tirer profit du remplacement des cuves à fioul et des installations de chauffage, dont ils assurent aujourd’hui la maintenance. Bref, une transition gagnante pour tous.

« De l’utopie au bon sens »

Si Samsø est aujourd’hui neutre en carbone, il reste néanmoins encore du travail pour se libérer entièrement des énergies fossiles. Lorsque Samsø a reçu le prix ‘Climate Leader’ des Nations Unies en 2021, des voix se sont élevées à travers le Danemark pour dénoncer le fait que la transition de Samsø n’avait pas assez évolué depuis une vingtaine d’années, voire avait fait un pas en arrière. La commune vient d’investir dans un nouveau ferry au diesel pour relier l’île à la ville d’Aarhus; et avec 55% des émissions de CO2 de l’île, l’agriculture – qui représente un tiers des emplois îliens – reste un casse-tête écologique. 

Aussi la commune continue de se fixer de nouveaux objectifs. “De l’utopie au bon sens”, c’est ainsi que l’Académie de l’énergie de Samsø, créée en 2007 pour partager et développer les connaissances liées aux renouvelables, décrit l’évolution des objectifs de l’île. Pour 2030 : « Nous construisons une usine de biogaz pour alimenter le ferry [qui relie Samsø à la péninsule du Jutland, NDLR]. Et nous sommes déjà la municipalité qui compte le plus de voitures électriques par habitant » précise Søren. Au-delà, Samsø rêve aussi d’économie circulaire, par exemple en restituant aux terres agricoles les eaux usées, chargées en nutriments. 

En attendant, l’Académie de l’énergie continue de recevoir des milliers de visiteurs chaque année et d’accompagner la transition de communautés dans le monde entier en leur montrant qu’avec un plan adapté aux spécificités locales et la participation des habitants, le zéro carbone est possible. 

L’un des villages les mieux préservés du Danemark, Nordby prouve qu’architecture ancienne et infrastructure nouvelle sont compatibles : ses maisons sont reliées à une chaudière biomasse collective.
Crédit photos : Amélie Drouet
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